Journée hommage à Jacques Cosnier > Résumés des interventions

  • Avec Jacques Cosnier de Lyon à la Tourette, de Cerisy à Urbino. Yves Winkin, CNAM, Paris.

On parle souvent des figures transgénérationnelles comme Jacques Cosnier comme étant des "passeurs". Oui, mais encore ? Je voudrais revenir sur des moments de passage très précis du début des années 80 au cours desquels Jacques Cosnier m'a accompagné, physiquement et psychologiquement : à Lyon à l'occasion de la visite de Goffman en 1982, au Couvent de la Tourette lors d'un séminaire de la revue Gestes et Images, à Cerisy au cours des colloques Bateson et Goffman, etc. Je tenterai de décrire comment Jacques Cosnier par une question de relance, par un sourire dans sa moustache, par un regard de son œil plissé,  remettait en selle le chercheur débutant et l'organisateur un peu perdu que j'étais alors.

  • Visualiser les concepts de Jacques Cosnier à travers une carte mentale. Sarata Mané, Université Lyon 3.

Cette intervention présentera une carte mentale interactive permettant d’explorer les concepts clés développés par Jacques Cosnier. Cet outil offre une vision synthétique de ses travaux en éthologie du langage et en interactionnisme, tout en mettant en avant les liens entre ses différentes recherches. La présentation expliquera le processus de création de la carte et son utilité pour diffuser, valoriser et mieux comprendre son héritage scientifique.

  • À travers la caméra de Jacques Cosnier : diachronie et résonances. Justine Lascar, Julien Thiburce et Véronique Traverso, ICAR.

 Cette contribution propose un parcours à travers l’œuvre audiovisuelle de Jacques Cosnier, sous forme de montage vidéo. À la lumière de ses réflexions théoriques et méthodologiques sur les apports de l’audiovisuel à l’étude de la communication interpersonnelle, nous chercherons à faire le lien entre ses pratiques et leurs résonances dans les travaux actuels menés au laboratoire ICAR, avec et autour de la vidéo.
Nous articulerons plusieurs dimensions du recours à l’audiovisuel : observer, analyser et montrer les dynamiques interactionnelles. Nous avons travaillé à partir d’un entretien filmé avec Jacques Cosnier, de ses interventions dans des séminaires, ainsi que de ses corpus et réalisations filmiques.

  • De l’éthologie compréhensive vers l’éthologie réflexive visuelle. Caroline Vincent, Aix-Marseille Université, LEST.

Jacques Cosnier (1978) a défini l’éthologie compréhensive comme “l’observation directe de comportements vécus dans l’ici et maintenant prenant en compte les événements interactionnels autant que les aspects et processus empathiques” (Cosnier, 2013, 258).

A sa suite, le collectif de recherche Interactions Multimodales Par ECrans (IMPEC) a développé une démarche de recherche d’éthologie réflexive visuelle (2021) afin d’analyser une situation de formation à la recherche à la fois en présentiel et distanciel dans le cadre d’un séminaire de recherche hybride. Cette démarche méthodologique et analytique choisit la vidéo pour recueillir, analyser et illustrer les phénomènes interactionnels et à l’appliquer à soi-même. Ainsi, le matériau audiovisuel primaire est conservé et enrichi par un apport sémiotique et narratif.
Cette intervention se centrera sur l’aspect visuel et multimodal de cette démarche, dans la lignée directe de l’éthologie compréhensive développée par Jacques Cosnier.

  • De l'Éthologie réflexive visuelle à la Phénoménologie critique des Interactions : une histoire de créativité, de transmission, et de passion. Samira Ibnelkaïd, Université de Oulu, ICAR.

Dans le sillage des travaux pionniers de Jacques Cosnier, mon intervention explorera la manière dont son approche éthologique -en plus d’avoir fait naître l’éthologie réflexive visuelle au sein du groupe de recherche sur les présences numériques fondé par Christine Develotte- nourrit la discipline que je développe aujourd’hui : la phénoménologie critique des interactions. Héritière de la curiosité sincère et espiègle de Jacques pour l’animal complexe qu’est l’humain, ses communications verbales, ses comportements incarnés, et ses affects marqués, je poursuis son exploration des dynamiques interactionnelles avec une posture désormais résolument critique. En mobilisant outils décoloniaux (approche engagée et transformatrice) et technologies numériques avancées (caméras contrôlées à distance, logiciels de traitement vidéo, etc.), je poursuis ainsi avec passion l’élan novateur et transdisciplinaire qui caractérisait l’œuvre de Jacques.

  • L’interactionnisme chez Jacques Cosnier : en quoi ses pratiques intégratives ont fait avancer l’étude des émotions. Kris Lund et Claire Polo, ICAR.

Le nomadisme scientifique, qui consiste à s’intégrer de diverses manières au sein de différentes communautés scientifiques, n’est pas la tasse de thé de tout le monde. En même temps, la recherche montre que la créativité conceptuelle émerge grâce à la confrontation de perspectives dans une visée de l’empathie épistémologique (e.g. Gardiner, 2020). La vision précoce de Jacques Cosnier de la construction conceptuelle de l’interactionnisme, est un exemple par excellence du nomadisme provoquant la créativité. Après avoir esquissé brièvement les caractéristiques des situations que Jacques Cosnier propose d’étudier, nous montrerons d’une part comment les aspects linguistique, social, et cognitif du dialogue en interaction sont imbriqués et d’autre part, en quoi le nomadisme scientifique dans ce cas, s’annonce fructueux.

  • Le « corps analyseur » chez Jacques Cosnier : un riche héritage conceptuel et sa fécondité à l’âge actuel du défi numérique. Vincent Rialle, Université de Grenoble.

Il s’agit d’une invitation à un voyage scientifique et humaniste dans la vaste maison conceptuelle que constituent les écrits (et autres traces telles qu'interviews…) de Jacques Cosnier, en le centrant, pour rester bref, sur l’épistémologie du corps. Ensuite et à partir de cette riche dynamique conceptuelle promue par lui, nous prolongerons ce voyage par quelques remarques sur notre univers social numérique. Cet univers, aujourd’hui largement saturés d’écrans et d’algorithmes parfois déshumanisants et que gouvernent quelques géants de « la Tech » aux pouvoirs exorbitants, gagnerait à être éclairé par le concept du «corps analyseur ». Un « retour de Psyché », ardemment promu par Jacques Cosnier mais encore incertain, se verrait alors renforcé.

  • L’empathie au prisme de la réalité virtuelle : évolution conceptuelle et nouvelles perspectives en éducation. Morgane Domanchin, Université d’Oslo,  Faculté des Sciences de l'Éducation.

L’empathie joue un rôle fondamental dans les interactions sociales, verbales et non-verbales, et contribue à être « plus sensible aux autres » (Brunel & Cosnier, 2012, p. 152). En salle de classe, l’enseignement de l’empathie s'avère particulièrement intéressant, non seulement pour développer les relations sociales des élèves, mais également pour les exposer à des perspectives diverses et stimuler leur pensée critique. La réalité virtuelle ouvre de nouvelles perspectives pour approfondir l’étude de l’empathie, telle qu'initiée par Cosnier et ses confrères. Bien que fondamentalement individuelle, elle permet des expériences immersives qui facilitent une compréhension plus profonde ainsi qu’une connexion émotionnelle authentique avec les expériences vécues d’autrui.

Dans cette présentation basée sur Silseth et al., (2024), nous aborderons l’empathie sous le prisme du corps et des interactions, en nous appuyant sur les travaux de Cosnier, tout en explorant les apports de la réalité virtuelle et ses défis dans un contexte éducatif norvégien.

  • Classifier les gestes coverbaux : l'apport de Jacques Cosnier. Marion Tellier, Aix-Marseille Université, Laboratoire Parole et Langage.

En France, les travaux de Jacques Cosnier, aux côtés de ceux de Calbris et Montredon, ont largement contribué à l’étude des gestes coverbaux, que ce soit dans une perspective psychologique, linguistique ou didactique. 

L’un des défis majeurs dans l’étude des gestes est leur classification : comment les distinguer selon des critères pertinents ? Cette question constitue un enjeu central pour les chercheurs. Or, comme le souligne Calbris (2011), il n’existe pas de schéma d’annotation universel. Kendon (2004) va encore plus loin en affirmant qu’élaborer un système d’annotation unifié serait une erreur.

Cependant, disposer d’une base commune d’annotation et d’une typologie partagée facilite la conception des schémas d’analyse et permet de comparer plus aisément les études. Ainsi, plusieurs tentatives ont été menées pour élaborer des classifications détaillées et généralisables dès les années 1960.

M. Tellier reviendra sur deux publications de Jacques Cosnier (Cosnier, 1982 et Cosnier et Vaysse,1997) pour montrer comment les distinctions proposées ont contribué aux recherches sur les gestes coverbaux.

  • « L’énoncé dépasse le prononcé » …Illustration par des étudiants inspirés par la classification fonctionnelle des gestes. (Cosnier, 1982). Agnès Witko Lyon 1 et Juliette Cosnier, petite-fille de Jacques, orthophoniste, Lyon.

 De la biologie du comportement à la communicologie clinique, Jacques Cosnier a endossé les jumelles de l’éthologie et le miroir de la psychologie pour sonder les moindres détails de l’activité sociale et les mystères des relations interpersonnelles. Des animaux aux êtres humains, des individus aux groupes, ou encore de l’invisible au peu visible, Jacques Cosnier avait le don de jongler avec les frontières interdisciplinaires en traquant les théories artificielles et les concepts flottants, au risque de partager sa propre subjectivité ! En puisant dans une variété de secteurs scientifiques, il refusait des généralités mal définies et proposait des ancrages conceptuels historiques, des descriptions renouvelées des comportements humains et des outils opérationnels pour décrypter la multicanalité du vivant. « Sit and watch ! » Ce précepte appliqué par Jacques Cosnier à la vie quotidienne, au langage ordinaire, aux interactions banales et spontanées se résume en deux principes :  d’abord observer sans a priori ! Ensuite classer sur la base de régularités ! Ainsi est née la classification fonctionnelle des gestes élaborée par Jacques Cosnier en 1982 et tournée dans un support vidéo par l’ARCI (Applications des Recherches sur la Communication et les Interactions, Lyon, mai 1989).

Pour cette journée de témoignages sur les apports scientifiques et pédagogiques de Jacques Cosnier à la communauté universitaire, la proposition est de présenter une exploitation pédagogique de quelques concepts sur la communication non verbale, et sur les gestes en particulier. Dans le cadre de travaux dirigés en premier cycle du cursus d’orthophonie, à l’université Claude Bernard Lyon1, les étudiants et les étudiantes ont eu l’opportunité de découvrir une pensée orientée vers le soin, dont ils se sont emparés avec beaucoup de vérité et de créativité. A notre manière, nous rendons hommage à quelques concepts que Jacques Cosnier nous a enseignés. Cette exploitation vivifiante de ses travaux montre comment il peut encore nous captiver aujourd’hui et nous convaincre que la mise en mots de certaines représentations a aussi besoin d’une mise en gestes (Cosnier, 1998, p. 98).

  • Les gestes… et les langues du dialogue, de la communication. Une approche panto-sémiotique du langage. Brahim Azaoui, LIRDEF, Université de Montpellier.

Jacques Cosnier a indubitablement marqué le champ de la multicanalité de la communication. Ses travaux ont très tôt questionné un lieu commun bien installé selon lequel le langage serait verbal. Dans cette intervention au titre en forme de clin d'œil, B. Azaoui proposera de poursuivre la déconstruction de cet imaginaire langagier engagé par Jacques Cosnier en interrogeant la possibilité d’associer à la diversité des ressources non verbales l’hétérogénéité linguistique en termes de normes et de variétés. Rappeler ainsi le caractère composite de la communication permet de concevoir le langage comme un ensemble constitutivement hétérogène de ressources multimodales et plurilingues. C'est dans cet esprit que B. Azaoui envisage de soumettre à la discussion la notion de répertoire pantosémiotique (Azaoui, 2023, 2024, 2025), envisagée comme une invitation à repenser les hiérarchies socialement et culturellement construites entre les modes de communication, à redéfinir les frontières entre ce qui relève du langage et de l'environnement (im)matiériel.

Le propos prendra appui sur une analyse de corpus filmiques d'interactions en UPE2A ou en crèche bilingue. L'analyse pantosémiotique (étude du corps, des ressources matérielles et plurilingues mobilisées) met au jour les stratégies déployées par les participants et montrent en quoi il est essentiel de repenser les frontières et les hiérarchies artificiellement établies entre ces ressources sémiotiques qui contribuent toutes, à divers degrés, selon les besoins et le contexte interactionnel, à la production /réception de sens.

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